lundi 23 novembre 2009

Cet été là --- "Bonjour tristesse" de Françoise Sagan


Il est de nombreux auteurs connus et reconnus que je n’ai pas encore eu le courage ou l’opportunité d’aborder. Je crois sincèrement qu’il faut être prêt pour accueillir la prose d’un écrivain dans notre giron personnel.
Cela commence par l’envie de se plonger dans un univers nouveau, où tout nous est étranger, très différent de ce que l’on côtoie d’ordinaire, troublant parfois et pas si facile d’accès que cela. Mais la condition ultime pour lire sereinement ces ouvrages, c’est notre capacité à aborder des conceptions innovantes. Il faut être prêt à les découvrir au fil de ces mots qui s’enchaînent avec une logique qui n’est pas la nôtre.
Cela peut être très plaisant, mais également déstabilisant car il est si agréable de camper sur ses positions, ses certitudes. L’inconnu, l’étranger, c’est dérangeant. On perd ses repères si rassurants.

Françoise Sagan n’aimait rien de moins que tout ce qui était convenu (du moins en apparence) et ce premier ouvrage allait faire couler beaucoup d’encre.
Cela ne pouvait que titiller agréablement ma curiosité.
Une attente imprévue et un passage à la FNAC la plus proche ont fait que cette volonté de découvrir plus avant la plume de cette femme hors norme a été possible.

Avec « Bonjour tristesse », disponible aujourd’hui chez Pocket pour une somme modique, Françoise Sagan connaît un succès immédiat et ce livre sera l’un des " best-seller " de l’année 1954. Elle a alors 18-19 ans. N’est-ce pas l’âge de la jeunesse éternelle, celle que l’on garde à jamais tout au fond de son cœur ?

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L’auteur : (Sources Evene)

Françoise Sagan,
Écrivain française,
Née à Carjac le 21 juin 1935,
Décédée à Honfleur le 24 Septembre 2004.

Issue d'une famille de la grande bourgeoisie, Françoise Quoirez, dite Sagan, passe une enfance épargnée par les pénuries de la Seconde Guerre mondiale.
Les années défilent et le triomphe se profile grâce à son roman « Bonjour tristesse » écrit à l'âge de 18 ans. Bien que le public et la critique soient séduits, cette oeuvre suscite la polémique. Traitant du désir sexuel d'un point de vue féminin, ses formules sont quelque peu acerbes.
Françoise Sagan adopte par la suite un style de vie des plus décalés, tant sur le plan de l'avoir que de l'être. Ses oeuvres s'en inspirent et mettent en exergue l'ennui et la fuite dans l'alcool. Elle incarne une insolence et une fraîcheur qui ne peuvent que choquer les étouffantes années 1950.

Tentée par la scène, elle s'essaye à quelques pièces de théâtre : « Un château en Suède », « La Robe mauve de Valentine », « L’Excès contraire »...

Malgré le succès de ses oeuvres, elle ne reçoit que peu de prix littéraires, mais se voit tout de même décerner en 1985 le prix Monaco, qui vient saluer l'ensemble de son oeuvre.

Si l'on peut toujours discuter de sa place dans le panthéon littéraire, Françoise Sagan était avant tout un être vrai et libre. Elle restera dans l'histoire comme un personnage, sans doute plus important que ses livres, un mythe dont la notoriété dépasse les frontières de l'Hexagone, le totem d'une époque faite de liberté et d'insouciance.

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L’intrigue :

La villa est magnifique, l'été brûlant, la Méditerranée toute proche. Cécile a dix-sept ans. Elle ne connaît de l'amour que des baisers, des rendez-vous, des lassitudes. Pas pour longtemps. Son père, veuf, est un adepte joyeux des liaisons passagères et sans importance. Ils s'amusent, ils n'ont besoin de personne, ils sont heureux.

La visite d'une femme de cœur, intelligente et calme, vient troubler ce délicieux désordre. Comment écarter la menace ? Dans la pinède embrasée, un jeu cruel se prépare. C'était l'été 1954.

On entendait pour la première fois la voix sèche et rapide d'un "charmant petit monstre" qui allait faire scandale. La deuxième moitié du XXe siècle commençait. Elle serait à l'image de cette adolescente déchirée entre le remords et le culte du plaisir.

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Ce que j’en pense :

« Bonjour tristesse » est une première œuvre, mais déjà cet ouvrage contient tous les thèmes chers à Françoise Sagan : la vie facile, les voitures rapides, les villas bourgeoises, le soleil, un mélange de cynisme, de sensualité, d’indifférence et d’oisiveté. Ne connaissant pas cet auteur, je me jette dans ces lignes sans aucune idée préconçue.

Nous voilà donc plongés dans un été comme tant d’autres, chaud, avec la fraîcheur relative des eaux de la Méditerranée face aux pinèdes qui résistent tant bien que mal aux rayons du soleil ardant.
La brûlure pourtant ne viendra pas forcément de là où on l’attend (enfin sauf peut-être pour cette pauvre Elsa qui décidément ne peut que brûler, se consumer inexorablement et courir ainsi vers sa perte qui était de toute manière prévisible à plus ou moins longue échéance.)
« Les premiers jours furent éblouissants. Nous passions des heures sur la plage, écrasés de chaleur, prenant peu à peu une couleur saine et dorée, à l’exception d’Elsa qui rougissait et pelait dans d’affreuses souffrances. »
« La pauvre Elsa était dans un état lamentable, elle se couvrait d’huile. Je ne donnais pas une semaine à mon père pour… »

Elsa était pourtant un parfait faire valoir avec cette cure de soleil pour le père de Cécile (17 ans). Ce veuf était un parfait Don Juan qui se lassait assez vite de ses conquêtes toujours prises sur un modèle immuable. La jeune femme y correspondait parfaitement et cela donne une idée de l’univers futile, surfait dans lequel évolue notre jeune narratrice.
« À ce début d’été, il poussa même la gentillesse jusqu’à me demander si la compagnie d’Elsa, sa maîtresse actuelle, ne m’ennuierait pas pendant les vacances. Je ne pus que l’encourager car je savais son besoin des femmes et que, d’autre part, Elsa ne nous fatiguerait pas. C’était une grande fille rousse, mi-créature, mi-mondaine, qui faisait de la figuration dans les studios et les bars des Champs-Élysées. Elle était gentille, assez simple et sans prétentions sérieuses. »

Pour un peu, on oublierait que nous sommes en 1954. Tout est tellement actuel que rien ne paraît dater de plus de cinquante ans. Il en va ainsi de certains sentiments, des révoltes de jeunesse, mais aussi du cœur des Hommes.
Et oui, à l’heure du tout numérique où tout va de plus en plus vite, on peut encore se reconnaître dans des personnages qui n’ont pas pris une ride malgré les années qui se sont écoulées. La véritable fontaine de Jouvence est très certainement là.

Suivant notre propre âge, on se projette plus dans l’un des protagonistes que dans un autre, mais au fond, le discours qui trouve le plus de résonance dans notre cœur, dans notre âme, c’est celui de Cécile. Elle est le reflet de cette jeunesse éternelle, fougueuse et parfois révoltée, le plus souvent insouciante et si peu attentive aux conséquences de ses actes pour le lendemain tant l’ivresse se doit d’être totale et instantanée.
Même si nous avons été plus sage qu’elle, Cécile nous rappelle comment nous aimions, souhaiterions réagir alors.
Sa liberté d’action est telle que l’on peut l’envier tant alors, au même âge, on se sentait prisonnier de nos geôles. On en voulait à la Terre entière de ne pas écouter notre avis et encore moins de lui trouver un semblant d’intérêt.
« - Vous avez des idées à la mode, mais sans valeur, dit Anne
C’était peut-être vrai. Je pensais ce que je disais, mais il était vrai que je l’avais entendu dire. Néanmoins, ma vie, celle de mon père allait à l’appui de cette théorie et Anne me blessait en la méprisant. On peut être aussi attaché à des futilités qu’à autre chose. Mais Anne ne me considérait pas comme un être pensant. »

Ici point n’est besoin d’un suspens insoutenable, de meurtres affreux ou d’effets spéciaux. Tout coule de source avec une telle évidence que cela s’impose à nous avec un naturel désarmant. Le génie réside dans la simplicité, dans ce que l’on considère comme tellement évident qu’on n’y porte plus aucune attention.

« Bonjour tristesse », c’est le récit d’un été pas tout à fait comme les autres. Celui où la vie va en bousculer plus d’un, mais après tout, c’est la vie justement. Tout n’est pas que gaieté ou pleurs. Il faut un peu de tout et l’on apprend souvent en se brûlant les doigts, sinon les ailes.


Ma note finale : 14 / 20

1 commentaire:

Aily a dit…

Je ne connais pas du tout cette oeuvre mais j'ai trouvé que tu en parlais très bien !