samedi 27 août 2011

Tuer le père d'Amélie Nothomb

Le livre :

Tuer le père d'Amélie Nothomb, aux éditions Albin Michel, 150 pages, 16€


Le pitch :

Tout commence autour d'une table de jeu.
Amélie, de sortie un soir, repère deux hommes aussi dissemblables que possible. L'un pouvant être le père de l'autre.
C'est leur histoire qu'elle nous conte alors.


Ce que j'en ai pensé :

La magie est le point de départ de ce roman. Amélie Nothomb ne manque pas d'imagination et chaque année, en août, j'attends la sortie de son nouvel opus.
J'aime la magie de son écriture. En quelques phrases, je reconnais son style. C'est à mon sens très facile à lire, mais il y a une véritable recherche dans cette écriture. Elle retranscrit toujours des situations presque banales, cependant, il y a cette touche d'excentricité propre à Amélie Nothomb qui fait que rien n'est jamais aussi simple qu'il y parait.
Cette dernière apparait souvent dans ses romans. Reste juste qu'il ne faudrait surtout pas tout prendre au pied de la lettre et faire la distinction entre Amélie, le personnage de fiction et Amélie, la romancière (la vraie en somme). Jeu troublant où se mêle la vérité, la fiction et qui m'enchante. Je suis surprise et je ne m'ennuie jamais durant mes lectures. J'apprécie vraiment ses facéties littéraires.

Les relations humaines vont rapidement prendre le dessus et donner tout son sens au titre de cet opus 2011. On est assez loin de la magie, on serait davantage dans le registre de la psychologie : figure paternelle de substitution, relation maternelle qui tourne court, recherche d'identité sexuelle et de partenaire… Des éléments assez primaires, basiques, mais avec des possibilités multiples.
Joe, Christina et Norman formeraient presque un trio banal : deux hommes d'âges différents (l'un pourrait être le père de l'autre), une femme belle et attirante. Des liens forts les unissent, comme ceux d'une véritable famille alors qu'ils ne sont ensemble que depuis peu de temps en réalité. La qualité n'attend pas forcément le nombre d'année qu'il faudrait et se fiche bien des liens du sang. C'est aussi le cas pour le talent, celui de Joe.

On pense voir venir de loin le dénouement de cette intrigue, mais ce serait faire injure à l'écriture d'Amélie Nothomb. Rien ne se déroule tout à fait de manière linéaire et rien n'est moins prévisible que le raisonnement de cet auteur. N'est-ce pas pour cela que je me plonge avec délectation chaque année dans son dernier "bébé" de papier ?
Je ne regrette toujours qu'une chose (parfois plus, mais celle-ci reste une constante) : la brièveté de ce plaisir. 150 pages, c'est court et je me suis donc efforcée (ce ne fut pas facile) de ne pas engloutir d'une traite ce titre afin de prolonger ma découverte et mieux savourer cette gourmandise littéraire.
Je comprends parfaitement que certains lecteurs ne soient pas de mon avis. L'univers d'Amélie Nothomb laisse rarement de marbre. On aime ou on déteste. Ses livres étant très proches du personnage qu'incarne l'écrivain Belge, ils peuvent irriter ou au contraire séduire. J'ai moi-même mis du temps pour l'apprécier, des années serait plus précis comme unité de mesure temporelle. Je me suis sentie longtemps refoulée par cette oeuvre que je ne comprenais pas. Et puis un jour, après une énième tentative (je suis du genre têtu), le déclic s'est fait. J'étais contaminée par la folie "nothombienne".
De folie, il en sera aussi question dans "tuer le père", mais aussi d'amour qui conduit à celle-ci. On reste dans les extrêmes, rien n'est tiède, tout est intense.

Vous l'avez compris, j'ai adoré ce livre et je terminerai avec quelques mots sur la couverture : un portrait en négatif d'Amélie Nothomb, du rouge (la couleur de la passion ?) et des passages de "biographie de la faim" (un autre ouvrage de l'écrivain) en filigrane. Les psys auraient bien du boulot avec tout ceci, mais moi, pauvre lectrice, ce que j'y vois surtout, c'est un auteur qui joue avec les mots, leurs sens, y mêle de la couleur vive et riche en symbole ainsi que son image (narcissique ?).
Avec tous les titres qui vont sortir durant cette rentrée littéraire (plus de 650), il est bon de garder son identité même et surtout quand on est aussi attendu que l'est Amélie Nothomb.



Et s'il fallait mettre une note : 18 / 20



Les bonus :

Une vidéo de présentation par Amélie Nothomb, elle-même :






Un site non officiel, mais très complet sur Amélie Nothomb : http://antechrista.info/

La fiche Wikipédia sur Amélie Nothomb : http://fr.wikipedia.org/wiki/Am%C3%A9lie_Nothomb

jeudi 11 août 2011

La maison Matchiaev de Stanislas Wails

Le livre :

La maison Matchaiev de Stanislas Wails, éditions Serge Safran, 256 pages, 16 €



Le pitch :

A la mort de Sergueï Matchaiev, ses trois enfants – entre vingt et trente ans – héritent de la maison paternelle en Bourgogne, dernier témoin d'une histoire familiale mouvementée, à l'image des romans russes que Sergueï leur lisait dans leur enfance.
Faut-il la garder, la vendre ? Que faire de ces souvenirs à la fois très doux et trop lourds ? C’est par une approche ludique, pleine de vivacité, d’originalité, d’humour et de tendresse, en prise directe avec les affres et les joies d’une jeune génération en quête d’identité, que Stanislas Wails, à la manière du Vereker d'Henry James, tisse une trame romanesque réaliste et imaginative, incitant à la réflexion et à la rêverie.


Ce que j'en pense :

On débute notre lecture par une lettre de Sergueï et ce n'est pas n'importe quelle missive, c'est une lettre d'adieu à ses trois enfants, ses trois bonheurs. Loin d'être seulement triste, elle est émouvante, sincère, vive et étonnamment pleine de vie. Elle nous touche alors qu'on ne le connait même pas. Alors imaginez l'effet qu'elle va produire sur ses enfants…
Assez courte, elle reste une magnifique introduction au reste du récit.

Ce dernier aussi est plein de vie, de tranches d'existences que l'on met bout à bout pour enfin comprendre qui est qui et pour qui. Cela reste frais, vivace, piquant, rythmé comme toutes les journées bien remplies de ces jeunes gens qui sont les protagonistes principaux de ce roman.
Je me suis laissée prendre par cette écriture sans fioritures, mais riche. Les pages ont assez vites défilées sans que je m'en rende compte. J'ai été happée par l'intrigue à la fois ordinaire et nouvelle.
En effet, voilà une situation plutôt courante : un décès, une maison, des héritiers assez jeunes, des dettes… Qu'est-ce qu'on fait ? On garde ou on vend ?

Les personnages sont centraux et c'est sur eux que repose vraiment en fin de compte toute l'histoire. La maison est un prétexte, un noyau qui attire les trois enfants de Sergueï et les obligent donc à se voir, se revoir, à échanger ou pas…
Ils sont attachants, très réels, palpables ou au moins très présents pour le lecteur qui les croit véridiques au possible. Ils sont tangibles, crédibles, en bref, ils sont authentiques et nous ressemblent.
Les scènes s'enchainent, sont d'une grande vivacité et quand on sait que Stanilas Wails a travaillé avec Alains Resnais, on ne peut , en effet, s'empêcher de faire le rapprochement avec certains films de ce dernier. Il y a de cela aussi. C'est un ouvrage au final extrêment dynamique et visuel. Même les dialogues semblent plus vivants que d'ordinaire (dans les romans). Il y a un souffle de vie indéniable dans cette écriture.

On se retrouve dans ce texte, mais on y perçoit aussi une certaine différence comme avec cette famille, les Matchaiev (d'origine Russe). C'est semblable et tout à la fois différent.
Voilà qui peut paraître fort étrange et pourtant je ne pense pas être la seule a avoir déjà ressenti cette impression.
De toutes manières, tout dans le livre est comme cela. J'en ai même du mal à  l'évoquer car c'est comme si tout était confus dans mon esprit sauf pour la notion de plaisir que j'ai aussi ressenti à lire "La maison Matchaiev".
Au final, c'est peut-être seulement cela qu'il faut retenir.


Et s'il fallait mettre une note : 16 / 20



Bonus :

Le lien pour en savoir plus sur Stanislas Wails via Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Stanislas_Wails

Une vidéo pour parler du livre, c'est l'auteur lui-même qui va vous donner envie de découvrir son ouvrage :
Stanislas Wails - La maison Matchaiev par Librairie_Mollat

dimanche 7 août 2011

L'Enquête de Philippe Claudel



Le livre :

L'Enquête de Philippe Claudel, Chez Stock, 277 pages, 19 €.


Ce qui m'a fait l'emprunter en bibliothèque, c'est aussi ce que l'on peut lire en quatrième de couverture :

" Nous traversons des temps difficiles, vous n'êtes pas sans le savoir.
Très difficiles. Qui pourrait prévoir ce que nous allons devenir, vous, moi, la planète... ? Rien n'est simple. Un peu d'eau ? Non ? Comme vous voulez. Après tout, si vous permettez, je peux bien me confier à vous, à mon poste, on est bien seul, terrible-ment seul, et vous êtes une sorte de médecin, n'est-ce pas ? Pas vraiment..., murmura l'Enquêteur. Allez, ne soyez pas si modeste ! " reprit le Responsable en lui tapant sur la cuisse.
Puis il inspira longuement, ferma les yeux, expira l'air, rouvrit les yeux. " Rappelez-moi le but exact de votre visite ? A vrai dire, ce n'est pas vraiment une visite. Je dois enquêter sur les suicides qui ont touché l'Entreprise. Les suicides ? Première nouvelle... On me les aura sans doute cachés. Mes collaborateurs savent qu'il ne faut pas me contrarier. Des suicides, pensez donc, si j'avais été au courant, Dieu seul sait ce que j'aurais pu faire ! Des suicides ? "


Ce que j'en ai pensé après l'avoir lu :

"L'Enquête" de Philippe Claudel est un roman atypique et c'est ce qui m'avait plu quand j'avais découvert cet ouvrage présenté par son auteur lors de son passage dans mon émission culte : "La grande librairie", sur France  5. Autant je peux apprécier l'ordre, le rangement dans ma vie privée que parfois, une pointe de désordre dans oeuvre littéraire me parait appréciable pour justement bousculer un peu ma façon de penser, de concevoir le monde.

Il n'est pas si facile que cela de ce glisser dans ce récit.
Les premières pages passent plutôt très bien, mais ensuite, on est comme l'Enquêteur, on se retrouve dans la brume la plus épaisse qui soit. La ville, ses repères, tout se floute et même le temps ne s'écoule plus normalement.
Rien n'est nommé et surtout pas les protagonistes. On a droit à une version "générique" comme pour les médicaments :
- La firme machin = l'Entreprise
- La Ville
- La Foule
- L'Enquêteur
- Le Fondateur
etc…

On atterrit assez vite dans des situations sur-réalistes :
- Les fenêtres murées
- Les petits déjeuners pris à l'hôtel
- Un hôtel classé 4 étoiles, mais miteux
etc…

J'avoue avoir eu envie de décrocher de cette lecture(mais je l'avais emprunté à la médiathèque donc au moins je n'avais pas déboursé tous mes euros pour ce livre). Je n'avais plus mes repères traditionnels et même si cela est appréciable parfois, cette fois, c'était un peu trop. L'absurde prenait une part trop importante pour ma rationalité et je me suis retrouvée en faite dans une position aussi inconfortable que celle du héros de ce récit : l'Enquêteur.
J'ai continué pourtant, sans trop savoir véritablement pourquoi. Peut-être parce que je n'aime pas rester sur un échec, même au niveau de mes lectures. L'Enquêteur lui pouvait au moins se raccrocher à sa mission, l'Enquête. Et puis, j'ai aussi éprouvé un peu de pitié pour ce pauvre homme.
Et enfin, je me suis demandée si nous n'étions pas autre chose que des personnages sans plus de consistance que des numéros ou des appellations aussi larges que celles usitées dans "l'Enquête" de Philippe Claudel.  Combien de fois ai-je eu la nette sensation que le monde dans lequel nous évoluons marchait sur la tête ? Parfois, la réalité est à peine moins étrange que les évènements relatés dans l'ouvrage. Tout est fait pour nous faire perdre notre identité propre, le formatage, la mondialisation, le lissage, le polissage des éléments… On s'oublie, on se perd…

Lecture chaotique au final avec ses hauts, mais aussi ses bas.
C'est un ouvrage effectivement déroutant que je ne recommanderais pas à tout le monde, mais qui trouvera sans nul doute son public.
J'en garderai un souvenir mitigé, mais je ne l'oublierai pas comme cela. Philippe Claudel a sans doute alors gagné son pari puisque son livre ne deviendra pas le Livre, mais un livre. Il restera quelque chose de particulier dans mon esprit, mais aussi dans ceux des autres lecteurs…


Et s'il fallait lui mettre une note : 12 / 20


En Bonus :

Philippe Claudel est un écrivain et un réalisateur français.
Né en février 1962 en Meurthe-et-Moselle, il est agrégé de lettres modernes. Il est à la fois maître de conférences à l'université de Nancy, mais a également été professeur en prison et auprès de jeunes handicapés.
Pour citer quelques unes de ses oeuvres, retenons :
- Les Âmes grises  en 2003 et adaptée au cinéma en 2005.
- Le rapport de Brodeck en 2007 (prix Goncourt des lycéens la même année)
Mais il y en a tant d'autres…

Et encore, un lien vers une vidéo pour vous présenter encore ce livre et avoir l'auteur qui vous en parle car c'est parfois ce qu'il y a de mieux :



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