Le livre :
L'art français de la guerre d'Alexis Jenni chez les éditions Gallimard, 21 €, 633 pages
Existe aussi en format livre électronique, version que j'ai personnellement lu sur ma liseuse.
Pourquoi cette lecture ? :
Il y avait longtemps (lol), mais voilà un ouvrage que je souhaitais lire avant même qu'il ne reçoive le précieux prix de l'académie Goncourt. J'avais encore une fois vu Alexis Jenni durant sa première télévision dans "La grande librairie" (émission littéraire que je suis chaque semaine, le jeudi sur France 5) en septembre 2011. J'avais ensuite lu quelques bons papiers dans "Le monde des livres" du vendredi (supplément du quotidien).
J'ai attendu mon heure et l'occasion car on ne se lance pas impunément dans la lecture d'un ouvrage aussi dense (enfin d'après ce qu'il parait). La guerre n'est pas véritablement un sujet que j'affectionne, mais je suis curieuse et j'aime découvrir sans cesse de nouveaux styles littéraires, de nouvelles plumes, de nouveaux auteurs. Là, il s'agit d'un premier roman et pas n'importe lequel toujours selon la rumeur.
Forcément, j'ai été faible, j'ai cédé aux chants des sirènes… (Oui, dans mon cas, cela fonctionne même si je suis une femme et que j'aime la gente masculine… Pourquoi ? Mais, je vous en pose moi des questions ?)
Le pitch :
J'allais mal; tout va mal; j'attendais la fin.
Quand j'ai rencontré Victorien Salagnon, il ne pouvait être pire, il l'avait faite la guerre de vingt ans qui nous obsède, qui n'arrive pas à finir, il avait parcouru le monde avec sa bande armée, il devait avoir du sang jusqu'aux coudes. Mais il m'a appris à peindre. Il devait être le seul peintre de toute l'armée coloniale, mais là-bas on ne faisait pas attention à ces détails. Il m'apprit à peindre, et en échange je lui écrivis son histoire.
Il dit, et je pus montrer, et je vis le fleuve de sang qui traverse ma ville si paisible, je vis l'art français de la guerre qui ne change pas, et je vis l'émeute qui vient toujours pour les mêmes raisons, des raisons françaises qui ne changent pas. Victorien Salagnon me rendit le temps tout entier, à travers la guerre qui hante notre langue.
Ce que j'en ai pensé :
Les pavés ne m'ont jamais effrayés, même lorsque j'étais enfant et alors toute jeune lectrice. Il faut juste que ces monstres de papier (ou numérique) soient un minimum captivants ou intrigants. Il faut que l'auteur parvienne à piquer ma curiosité, m'étonne au fil des pages, me tienne en haleine pour que je poursuive ma lecture. Bref, je suis comme vous, je suis et je reste une lectrice très ordinaire sans aucun doute.
Avec "L'art français de la guerre", je savais un peu à quoi m'attendre vu que pour une fois j'avais lu plusieurs critique dessus, cependant, le ressenti des autres lecteurs n'est jamais tout à fait le sien. Et puis, j'avais laissé s'écouler pas mal de temps avant de me lancer dans l'aventure, histoire aussi de ne pas être trop influencée par ces avis extérieurs. C'est donc avec une relative fraîcheur que j'ai abordé cette oeuvre.
Il fallait au moins cela pour ne pas sombrer dans un humeur trop sombre.
Le narrateur est un homme qui ne m'est pas franchement sympathique de prime abord. Il semble ne pas avoir de passé son présent est précaire, quant à son avenir, c'est sans doute un long passé (hommage une chanson).
Il est un brin feignant, a une vision de l'existence assez molle et ne brille pas par un trait de caractère particulier. Certes, il n'est pas sot, il lui arrive de se poser pas mal de questions, d'approfondir ces dernières en allant se documenter dans des livres (bon point), mais ce n'est pas le type d'individu qui pourrait m'attirer dans la vie quotidienne.
Le sujet, la guerre et tout ce qui peut s'y rapporter n'est pas non plus mon sujet de prédilection, mais au vu de la nature humaine, on est bien obligé de faire avec. Les conflits sont permanents, regardez les informations pour vous en convaincre. Hélas !!!! On veut toujours ce que possède l'autre et l'autre veut se obérer du joug du premier, ainsi s'explique les guerres coloniales dont il sera question dans cet ouvrage de poids (dans tous les sens du terme, surtout pour les lecteurs de la version papier).
L'autre personnage important du livre est Victorien Salagnon.
Un homme déjà âgé qui porte un lourd passé. Toute son histoire ou presque peut se découvrir au fil de ses dessins, mais aussi dans ses "mémoires". Il est beaucoup plus consistant que le narrateur, il possède une certaine épaisseur. Il en a tellement vu durant son existence aussi qu'il a couché cela sur le papier, à sa manière… Un façon bien personnelle de ne pas devenir fou, de garder les pieds, mais aussi l'esprit bien ancré sur terre.
Le style d'écriture m'a semblé un peu lourd. C'est peut-être l'accumulation (voulue) des répétitions ? Cela m'a donné l'impression parfois de suivre un cours avec la mise en avant de tous les éléments clés à retenir. C'est un peu lassant quand même à la longue.
En fait, j'ai alterné sans cesse l'envie de continuer ma lecture et celle de m'arrêter là. J'avais toujours envie de lire quelques pages, mais ensuite venait un peu de lassitude. Très étrange ce mélange de sensations, un peu comme nos deux personnages principaux : des opposés, des gens qui ne vont pas bien ensemble… Et qui pourtant se retrouvent.
L'alternance des chapitres donne un semblant de rythme à cette lecture qui est un marathon et non pas un sprint.
Il m'est arrivé ne plus trop bien savoir ce que je lisais et pourquoi je le lisais. Livre avec trop de longueurs, de digressions, de détails ? Fort possible et assurément probable pour la lectrice que je suis. Après avoir marqué une pause, j'ai pu aussi noté qu'au final cette richesse n'était seulement un handicap, mais plutôt une valeur ajoutée.
Il est clair qu'il faut prendre un peu son temps pour intégrer et digérer l'ensemble.
On se pose des questions, on cherche le sens de toutes ces guerres, on se demande si le prix à payer n'était quand même pas trop élevé (tant de victimes dans chacun des camps adverses), on tourne et retourne tout ceci dans nos têtes avec ce que nous savons déjà de ces 20 ans qui seront plus particulièrement passées au crible (1942-1962), on y mêle les éléments livrés dans l'ouvrage… Sans pour autant être satisfait du résultat final.
Rien de bien neuf sous le soleil, mais un premier ouvrage fort ambitieux qui pourra en décourager plus d'un. Je ne sais pas trop si je dois vous le recommander. Il ne s'adresse pas à un trop large public qui se lassera assez vite et qui ne saisira pas toute la portée de certains détails.
Feuilletez ce livre, voyez si vous sentez prêt à passer du temps avec le narrateur et Victorien. C'est une lecture qui engage forcément un peu…
Et s'il fallait mettre une note : 13 / 20
Les bonus :
Alexis Jenni vous présente son ouvrage "L'art français de la guerre" aux éditions Gallimard :
http://www.mollat.com/livres/alexis-jenni-art-francais-guerre-9782070134588.html
La réaction d'Alexis Jenni lors des résultats du prix Goncourt :
2 commentaires:
je partage ton ressenti, un peu mitigée par la longueur, la difficulté à lire ce texte, mais en même temps convaincue de sa richesse.
Je ne suis toujours pas décidée à le lire donc!
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